Quand le facilitateur ferme les portes avant de les ouvrir
Yvan Verougstraete, l’homme des ponts… qui commence par dresser des barrières
Par Kadir Duran – Bruxelles Korner
Un entrepreneur devenu stratège politique
À 53 ans, Yvan Verougstraete aime structurer sa vie en cycles. Les 23 premières années furent celles de la formation et de l’engagement local (conseiller PSC dès 18 ans, master en droit à l’UCL, MBA à Vlerick). Les 23 suivantes, celles de l’entrepreneuriat : consultant, passage par Delitraiteur, puis fondateur de Medi-Market, son plus grand succès.
Pour le prochain cycle, il s’est fixé une mission : rendre à la société ce qu’elle lui a offert, en bâtissant un projet politique équilibré et durable. Son récit personnel, largement relayé sur son site et ses réseaux, est clair : il veut placer le bien commun au-dessus des égoïsmes, bâtir des ponts plutôt que des murs, et agir avec passion.
Le facilitateur en mission impossible ?
Depuis le 12 août, le président des Engagés s’est vu confier par Groen, Vooruit et CD&V la tâche de “faciliter” la formation du gouvernement bruxellois, bloquée depuis 14 mois.
Son mandat : écouter tous les partis démocratiques et rédiger une note-cadre.
Son ambition affichée : débloquer Bruxelles et mettre fin à l’immobilisme.
Mais dès ses premières déclarations, le paradoxe éclate. Interrogé sur les partenaires possibles, Verougstraete avoue ne pas croire à une coalition avec Team Fouad Ahidar (TFA), deuxième force néerlandophone, ni avec le PTB. “Je vais les rencontrer, mais je ne gouvernerai pas avec eux”, dit-il en marge de ses entretiens.
Ponts dans le discours, barrières dans les faits
Le contraste est saisissant. L’homme qui, dans sa communication, revendique l’ouverture et la neutralité, sape lui-même sa crédibilité de facilitateur. Comment construire un projet commun quand on exclut certains acteurs avant même de s’asseoir à table ?
TFA a réagi avec fermeté : refus de participer aux bilatérales, dénonçant un processus biaisé et une perte de temps pour les Bruxellois. “Nous ne jouerons pas les figurants dans un mauvais film”, tranche Fouad Ahidar.
La double casquette qui dérange
Car derrière la posture de “rassembleur bienveillant”, une autre réalité s’impose : Yvan Verougstraete reste avant tout président des Engagés. Sa mission de facilitateur, censée être neutre, s’inscrit dans une stratégie de son propre parti, qui espère construire une coalition avec Groen, Vooruit et CD&V – sans TFA, jugé encombrant.
Une double casquette qui interroge : le facilitateur est-il vraiment un arbitre, ou simplement un stratège qui prépare le terrain à sa propre formation ?
Le risque d’un échec annoncé
À force de vouloir aller vite, Yvan Verougstraete prend le risque d’user prématurément son capital politique. Son storytelling d’entrepreneur visionnaire, “homme des ponts” et des compromis, se heurte à la dure mécanique des vetos bruxellois.
Dans un Parlement où chaque voix compte et où la double majorité est indispensable, écarter TFA ou d’autres partenaires dès le départ pourrait condamner sa mission.
Conclusion :
Yvan Verougstraete voulait incarner le facilitateur impartial, capable de sortir Bruxelles de l’impasse. Mais en mélangeant communication inspirante et calcul partisan, il a offert à ses adversaires un angle d’attaque facile : celui d’un “faiseur de ponts” qui commence par dresser des barrières.
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