« Un bourgmestre qui a tout sacrifié pour rester au pouvoir… et qui a fini par perdre sa commune. Campagne digne d’une présidentielle, alliances opportunistes, fêtes à répétition, promesses intenables : résultat, une caisse vide et un déficit abyssal. »
Saint-Josse-ten-Noode : quand la soif de pouvoir précipite la commune dans la crise
Par Kadir Duran – Bruxelles Korner
Le crépuscule d’un empire fissuré, un bourgmestre ( Emir Kir ) qui a tout fait pour rester au pouvoir… et qui a fini par perdre sa commune.
Fraude électorale, reconvocation des électeurs aux urnes, ralliement d’anciens socialistes à sa liste, alliances opportunistes sans idéologie – de gauche, de droite ou du centre, peu importe, pourvu qu’il reste en place. Le bourgmestre a rassemblé autour de lui tous les faiseurs de voix, dans une stratégie où seule comptait la réélection, à n’importe quel prix.
Un pouvoir qui coûte cher. Très cher. Une campagne digne d’une présidentielle : plus d’un an de mobilisation, des affiches à profusion, des fêtes de quartier à répétition, des engagements massifs de personnel, et des promesses d’un monde merveilleux. Mais la réalité est tout autre : une caisse communale vidée et des charges lourdes sans recettes suffisantes pour les compenser.
Aujourd’hui, on parle d’un trou de 10 millions d’euros, d’autres sources évoquent 20 à 30 millions. Où va-t-on ? Pourquoi a-t-on caché les œufs pourris dans l’armoire ? Était-ce par peur de perdre la face ou par orgueil de conserver coûte que coûte son fauteuil?
Une campagne permanente aux allures présidentielles
À Saint-Josse, le pouvoir s’est transformé en obsession. Pendant plus d’un an, le bourgmestre et son équipe ont mené une campagne d’ampleur inédite : affiches à profusion, fêtes de quartier, promesses mirobolantes et alliances électorales de toutes les couleurs – de droite, de gauche, du centre. Peu importait la cohérence idéologique : seul comptait l’objectif d’être réélu à tout prix.
Certains dénoncent une véritable dérive : rassemblement d’anciens opposants sur la liste du bourgmestre, utilisation massive de ressources publiques à des fins électorales, communication permanente digne d’une présidentielle. Mais derrière ce vernis festif, la réalité budgétaire s’est révélée implacable.
Des comptes dans le rouge vif
Alors qu’on annonçait encore récemment un léger boni pour 2023, les comptes ont révélé un déficit réel de 3,4 millions d’euros. Les réserves financières, autrefois constituées de 10 millions à l’époque de Jean Demannez, sont aujourd’hui réduites à… 22.000 €.
Pire encore : pour 2024, les pertes explosent à plus de 13 millions d’euros, et certains experts évoquent désormais un trou cumulé de 60 millions à combler.
Entre dettes envers le CPAS (≈ 11 millions), arriérés avec la zone de police (≈ 12 millions) et condamnations judiciaires (près de 2 millions), la situation frôle l’insolvabilité. Pour beaucoup, il ne s’agit plus d’une crise ponctuelle mais d’un effondrement structurel.
Une tutelle régionale inévitable
Face à ce gouffre, Saint-Josse a dû se tourner vers la Région bruxelloise. Via le Fonds régional de refinancement des trésoreries communales, la commune obtient une bouffée d’oxygène financière. Mais le prix est lourd :
• chaque dépense devra désormais être validée par un inspecteur régional,
• la commune devra présenter un plan de redressement crédible et durable,
• la gestion locale se fera sous surveillance, rappelant le spectre d’une tutelle que Saint-Josse n’avait plus connue depuis vingt ans.
Le ministre bruxellois des Pouvoirs locaux, Bernard Clerfayt, l’a rappelé sans détour : « Cette aide n’est pas un chèque en blanc. La commune doit rétablir ses finances et présenter un plan crédible ».
Les critiques de l’opposition
Le chef de groupe PS Philippe Boikote et d’autres voix de l’opposition dressent un réquisitoire sévère :
• Promesses non tenues : pas de toilettes publiques dans le Quartier Nord malgré les engagements.
• Dépenses inconsidérées : fêtes à répétition, communication électorale excessive.
• Projets pharaoniques : la Maison des Cultures, lancée en 2014 pour 4 millions, en coûte déjà 17 et reste inachevée.
• Gestion du personnel : heures supplémentaires non rémunérées pour les équipes de prévention.
• Manque de transparence : déficit masqué, décisions prises sans concertation, absence de stratégie durable.
D’autres dossiers sensibles aggravent encore le malaise : vols répétés à la piscine communale, insécurité liée aux chiens dangereux, entreprises locales soupçonnées de liens avec le crime organisé.
Les habitants, premiers pénalisés
Pour combler le déficit, la majorité a choisi une voie impopulaire : hausse des tarifs de stationnement (horaires, forfaits, frais de rappel). Une mesure « en stoemelings » – discrète mais lourde de conséquences – qui frappe directement les usagers, sans offrir de solution structurelle.
Dans le même temps, la fermeture du parc à conteneurs communal, jugé trop coûteux (500.000 € par an), prive les habitants d’un service de proximité essentiel. L’opposition dénonce une « perte nette pour le citoyen » et la poursuite d’une politique de liquidation du patrimoine communal.
Vers une faillite municipale ?
Le risque d’un dépôt de bilan communal est désormais évoqué. Certes, une commune ne peut pas faire faillite comme une entreprise privée : l’État ou la Région interviennent toujours pour garantir la continuité du service public. Mais l’image est parlante : Saint-Josse vit au-dessus de ses moyens depuis trop longtemps et paie aujourd’hui la facture.
Un enjeu démocratique autant que financier
La crise de Saint-Josse n’est pas seulement budgétaire. Elle traduit une dérive politique où l’obsession du pouvoir a pris le pas sur la gestion responsable.
Entre campagnes permanentes, promesses démesurées et dépenses festives, la gouvernance locale a négligé l’essentiel : équilibre budgétaire, transparence, services de base.
Le redressement passera par des mesures douloureuses : audit externe, réduction drastique des dépenses, mobilisation de nouvelles recettes, réorganisation du personnel et surtout, une reconstruction de la confiance avec les habitants.
À défaut, la commune risque de s’installer durablement dans une tutelle régionale qui sonnerait comme un aveu d’échec politique.
Pour conclure, j’invite le bourgmestre et son équipe à assumer leurs responsabilités en démissionnant, afin de laisser la place à l’opposition. Celle-ci serait plus à même d’appliquer les résolutions de la Région de Bruxelles-Capitale, de travailler sous tutelle régionale et de mettre en œuvre un véritable plan de redressement pour apurer les dettes de la commune.
« Nous ne toucherons pas aux missions de base de la commune et nous préserverons les habitants. Il faut que les gens vivent encore normalement ! »
Emir Kir Bourgmestre de S.J.T.N
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