L’Ouzbékistan : émergence d’un nouveau pôle d’attraction pour les investisseurs internationaux

L’Ouzbékistan : émergence d’un nouveau pôle d’attraction pour les investisseurs internationaux

Par Kadir Duran – Bruxelles Korner

Khiva, vitrine d’un pays en transformation économique

La ville historique de Khiva, joyau architectural de l’Ouzbékistan, a récemment démontré sa capacité à conjuguer patrimoine culturel et ambitions économiques modernes. Sous la direction éclairée de Jurabek Rakhimov, Gouverneur de la région de Khorezm, cette ancienne cité de la Route de la Soie a accueilli un forum international de l’investissement d’envergure exceptionnelle, rassemblant plus de deux cents entreprises représentant les cinq continents.

Le choix de Khiva comme cadre de cet événement économique majeur n’était nullement fortuit. Cette ville, dont le centre historique Ichan Kala figure au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1990, incarne parfaitement la philosophie de développement de l’Ouzbékistan contemporain : préserver et valoriser un héritage millénaire tout en s’ouvrant résolument aux opportunités du vingt-et-unième siècle.

Les délégations internationales, venues d’Europe, d’Asie, d’Amérique du Nord et du Moyen-Orient, ont pu découvrir non seulement la richesse architecturale et culturelle du pays, mais également goûter à l’hospitalité légendaire ouzbèke et à une gastronomie raffinée qui témoigne de la position géographique stratégique de cette nation au carrefour des civilisations. Au-delà de ces aspects culturels, les participants ont surtout identifié les multiples opportunités d’investissement offertes par un marché de plus de trente-cinq millions d’habitants en pleine expansion économique.

Les résultats tangibles de ce forum se sont concrétisés par la signature de nombreux accords de coopération et de partenariat, attestant de l’intérêt croissant que suscite l’Ouzbékistan auprès des investisseurs internationaux en quête de nouveaux marchés porteurs.

Une stratégie nationale d’attractivité clairement définie

L’intervention de M. I. Kasimov, vice-ministre des Investissements, de l’Industrie et du Commerce, et la Présentation du Directeur de l’Agence pour l’Attraction des Investissements Étrangers de la République d’Ouzbékistan, M. M. Rasulev :
« Potentiel économique et d’investissement de la République d’Ouzbékistan et de la région du Khorezm » ont constitué l’un des moments forts du forum. Leurs discours a permis de présenter les fondements de la nouvelle politique économique ouzbèke et d’expliciter la vision stratégique du gouvernement pour les années à venir.

Selon eux , “l’Ouzbékistan transcende désormais son statut de terre d’histoire et de culture pour s’affirmer comme une plateforme économique incontournable pour les investisseurs internationaux”. Cette déclaration reflète une ambition nationale claire : transformer le pays en hub économique régional capable de rivaliser avec les principales places financières et commerciales de l’Eurasie.

Cette stratégie s’appuie sur une approche pragmatique qui valorise les atouts naturels du pays - sa position géographique, ses ressources naturelles, sa population jeune et éduquée - tout en corrigeant les faiblesses structurelles héritées de décennies d’économie planifiée.

Un programme de réformes structurelles sans précédent

Depuis l’arrivée au pouvoir du Président Shavkat Mirziyoyev en 2017, l’Ouzbékistan a engagé une transformation économique et institutionnelle d’une ampleur remarquable. Cette révolution silencieuse s’articule autour de plusieurs axes stratégiques qui ont fondamentalement modifié l’environnement des affaires dans le pays.

La libéralisation du marché des changes constitue probablement la réforme la plus symbolique et la plus attendue par la communauté internationale des affaires. Pendant des décennies, l’accès aux devises étrangères représentait un obstacle majeur pour les entreprises souhaitant investir ou commercer avec l’Ouzbékistan. Désormais, les opérateurs économiques bénéficient d’un accès libre et transparent aux devises, supprimant ainsi l’un des principaux freins au développement du commerce international et des investissements étrangers.

L’instauration du Conseil des investisseurs étrangers marque une évolution fondamentale dans la relation entre l’État et les investisseurs internationaux. Cette instance, qui permet un dialogue direct avec la présidence, témoigne de la volonté politique d’impliquer étroitement le secteur privé étranger dans la définition des politiques économiques nationales. Les investisseurs disposent ainsi d’un canal de communication privilégié pour exprimer leurs préoccupations et suggérer des améliorations réglementaires.

La simplification administrative représente un autre pilier essentiel de cette transformation. L’objectif de permettre l’enregistrement d’une société en une seule journée, entièrement en ligne, illustre la détermination des autorités à éliminer la bureaucratie excessive qui entravait traditionnellement la création d’entreprises. Cette digitalisation des procédures administratives s’inscrit dans une démarche plus large de modernisation de l’État et d’amélioration de l’efficacité des services publics.

Les réformes fiscales adoptées depuis 2017 visent à créer un environnement fiscal compétitif et prévisible. La réduction des taux d’imposition, accompagnée de la mise en place d’une fiscalité numérique transparente, répond aux attentes des investisseurs internationaux en quête de stabilité réglementaire. La garantie de stabilité fiscale jusqu’en 2028 offre aux entreprises la visibilité nécessaire pour élaborer leurs plans de développement à moyen terme.

Le renforcement du cadre juridique, notamment par l’adoption de la loi sur l’arbitrage commercial international, consolide la sécurité juridique des investissements étrangers. Cette évolution répond aux préoccupations légitimes des entreprises internationales concernant la résolution des éventuels différends commerciaux selon des standards internationalement reconnus.

Ces réformes structurelles produisent déjà des résultats spectaculaires. Entre 2018 et 2024, l’Ouzbékistan a réussi à attirer plus de cent vingt milliards de dollars d’investissements étrangers directs, soit une multiplication par dix par rapport à la période précédente. Cette performance remarquable place le pays parmi les destinations d’investissement les plus dynamiques de la région eurasiatique.

Intégration accélérée dans l’économie mondiale

L’Ouzbékistan poursuit résolument son intégration dans les circuits économiques mondiaux à travers plusieurs initiatives stratégiques qui témoignent de ses ambitions internationales.

La candidature du pays à l’adhésion à l’Organisation mondiale du commerce, avec un objectif de finalisation d’ici 2026, représente un enjeu majeur pour l’économie ouzbèke. Cette adhésion permettra au pays de bénéficier pleinement des mécanismes du commerce international moderne tout en s’engageant à respecter les standards internationaux en matière de pratiques commerciales et de protection de la propriété intellectuelle.

Parallèlement, l’Ouzbékistan tire déjà parti de son statut de bénéficiaire du système de préférences généralisées renforcé (GSP+) de l’Union européenne. Ce régime commercial préférentiel offre un accès privilégié au marché européen de cinq cents millions de consommateurs pour plus de six mille produits ouzbèks, créant des opportunités d’exportation considérables pour les entreprises locales et étrangères implantées dans le pays.

L’appartenance à la zone de libre-échange de la Communauté des États indépendants facilite les échanges commerciaux avec les anciens pays soviétiques, maintenant ainsi des liens économiques historiques tout en les modernisant selon les standards contemporains du commerce international.

Le développement de zones économiques spéciales constitue un autre pilier de la stratégie d’ouverture économique. Ces zones offrent des régimes fiscaux et réglementaires particulièrement attractifs, permettant aux investisseurs étrangers de bénéficier de conditions d’exploitation optimisées. La zone économique spéciale de Termez illustre parfaitement cette approche en facilitant les échanges commerciaux avec l’Afghanistan et l’ensemble de l’Asie du Sud, positionnant l’Ouzbékistan comme une porte d’entrée vers des marchés en développement rapide.

Infrastructures et connectivité : au cœur de la nouvelle Route de la Soie

L’Ouzbékistan déploie une stratégie ambitieuse d’investissement dans les infrastructures de transport et de communication, visant à devenir un hub logistique majeur de l’Eurasie. Cette vision s’inscrit parfaitement dans le cadre de l’initiative chinoise de la nouvelle Route de la Soie, tout en préservant l’autonomie stratégique du pays.

Le développement de nouvelles lignes ferroviaires constitue l’épine dorsale de cette stratégie de connectivité. Le projet de liaison ferroviaire reliant la Chine au corridor transcaspien via le Kirghizstan et l’Ouzbékistan, puis se prolongeant jusqu’à la Turquie, transformera fondamentalement les flux commerciaux eurasiatiques. Cette infrastructure permettra de réduire significativement les temps et les coûts de transport entre l’Asie et l’Europe, positionnant l’Ouzbékistan comme un maillon essentiel de cette chaîne logistique continentale.

La modernisation des infrastructures aéroportuaires témoigne également de l’ambition internationale du pays. Le partenariat public-privé conclu pour la rénovation de l’aéroport international de Boukhara avec Incheon International Corporation, l’opérateur de l’aéroport de Séoul, illustre la volonté d’attirer l’expertise internationale pour développer des infrastructures aux standards mondiaux. Cette collaboration avec l’un des aéroports les plus performants au monde garantit un transfert de compétences et de technologies de pointe.

L’ouverture de liaisons aériennes directes vers des destinations stratégiques comme Tokyo et New York démontre l’ambition de connecter directement l’Ouzbékistan aux principaux centres économiques mondiaux. Ces liaisons facilitent non seulement les échanges commerciaux mais contribuent également au développement du tourisme d’affaires et culturel.

La politique de facilitation des visas, étendue à plus de quatre-vingt-dix pays, supprime un obstacle traditionnel à la mobilité des entrepreneurs et investisseurs internationaux. Cette mesure, apparemment technique, produit des effets considérables sur l’attractivité du pays en simplifiant les démarches administratives pour les hommes d’affaires étrangers.

Partenariats public-privé et programme de privatisations

L’adoption en 2019 d’un cadre juridique moderne pour les partenariats public-privé a ouvert de nouvelles perspectives de collaboration entre l’État ouzbek et le secteur privé international. Cette législation permet désormais de lancer des projets d’infrastructure stratégiques dans des secteurs vitaux comme la santé, les transports et l’énergie. Le portefeuille global de ces projets, évalué à trente milliards de dollars, témoigne de l’ampleur des opportunités d’investissement disponibles.

Le programme de privatisations engagé par les autorités ouzbèkes attire l’attention de grands groupes internationaux en quête d’opportunités d’acquisition dans des marchés émergents dynamiques. Les succès déjà enregistrés, notamment l’acquisition de Coca-Cola Ouzbékistan par des investisseurs turcs, ou l’implantation réussie du groupe singapourien Indorama et de la banque hongroise OTP Bank, démontrent la capacité du pays à attirer des investisseurs de premier plan.

L’agenda des privatisations prévues pour 2025 et au-delà concerne des secteurs économiques stratégiques : énergie, télécommunications, automobile et mines. Cette ouverture progressive du capital de secteurs traditionnellement contrôlés par l’État témoigne de la confiance des autorités dans la capacité du marché à améliorer l’efficacité économique tout en préservant les intérêts nationaux.

Secteurs porteurs et opportunités d’investissement

L’économie ouzbèke présente plusieurs secteurs particulièrement attractifs pour les investisseurs internationaux. L’industrie textile, traditionnellement forte grâce aux ressources cotonnières du pays, se modernise rapidement pour remonter la chaîne de valeur vers la confection et les produits finis à haute valeur ajoutée.

Le secteur minier offre des perspectives exceptionnelles, l’Ouzbékistan disposant de réserves importantes d’or, de cuivre, de zinc et d’uranium. La modernisation des techniques d’extraction et la participation d’entreprises internationales spécialisées permettront d’optimiser l’exploitation de ces ressources tout en respectant les standards environnementaux internationaux.

L’agriculture représente un secteur de diversification prioritaire. Au-delà du coton traditionnel, le pays développe la production de fruits et légumes destinés à l’exportation, bénéficiant de conditions climatiques favorables et d’une main-d’œuvre qualifiée. Les investissements dans les technologies agricoles modernes et les chaînes de transformation agroalimentaire offrent des perspectives de rendement attractives.

Le secteur des services financiers connaît une transformation accélérée avec l’arrivée d’établissements bancaires internationaux et le développement des services financiers digitaux. Cette modernisation du système financier facilite l’accès au crédit pour les entreprises et contribue à l’inclusion financière de la population.

Vision stratégique et perspectives d’avenir

L’Ouzbékistan du Président Mirziyoyev présente aujourd’hui le visage d’un pays résolument tourné vers l’avenir, qui s’appuie sur son héritage historique et culturel exceptionnel pour construire une économie moderne et compétitive. Cette transformation, engagée il y a seulement sept ans, produit déjà des résultats tangibles qui positionnent le pays parmi les destinations d’investissement les plus prometteuses de l’Eurasie.

La stratégie de développement économique ouzbèke se caractérise par son pragmatisme et son ouverture. Plutôt que de suivre un modèle unique, les autorités s’inspirent des meilleures pratiques internationales tout en les adaptant aux spécificités nationales. Cette approche équilibrée permet au pays d’éviter les écueils d’une libéralisation trop brutale tout en accélérant sa modernisation économique.

L’ambition affichée de devenir un hub économique eurasiatique ne relève pas de l’utopie mais s’appuie sur des atouts réels : une position géographique stratégique au carrefour des routes commerciales historiques et modernes, une population jeune et de plus en plus qualifiée, des ressources naturelles diversifiées et un environnement politique stable favorable aux investissements de long terme.

La réussite de cette transformation économique dépendra largement de la capacité des autorités à maintenir le cap des réformes tout en préservant la cohésion sociale. Les premiers signaux sont encourageants : la croissance économique soutenue, l’amélioration des indicateurs sociaux et la reconnaissance internationale croissante du pays témoignent de la pertinence de la stratégie adoptée.

Conclusion : un appel à saisir les opportunités d’un marché en devenir

Le message délivré lors du forum de Khiva résonne comme une invitation pressante adressée à la communauté internationale des affaires. L’Ouzbékistan d’aujourd’hui offre aux investisseurs étrangers une combinaison rare : un environnement des affaires en amélioration constante, des opportunités de marché considérables dans une économie en expansion rapide, et la stabilité politique nécessaire pour développer des projets de long terme.

Cette invitation s’adresse particulièrement aux entreprises européennes, qui peuvent bénéficier des accords commerciaux préférentiels, aux groupes asiatiques attirés par les perspectives de développement régional, et aux investisseurs américains en quête de diversification géographique dans des marchés émergents dynamiques.

L’Ouzbékistan contemporain illustre parfaitement la capacité d’un pays à se réinventer sans renier son identité. En conjuguant un héritage millénaire avec une vision d’avenir résolument moderne, ce pays de l’Asie centrale s’impose progressivement comme un acteur incontournable de l’économie eurasiatique du vingt-et-unième siècle.

Les investisseurs qui sauront identifier et saisir précocement ces opportunités exceptionnelles seront les premiers bénéficiaires de cette transformation économique remarquable. Le temps de l’hésitation semble révolu : l’Ouzbékistan est prêt à accueillir ceux qui partageront son ambition de construire ensemble l’économie de demain.