« Coalition Guinness » ou nouvel épisode d’un blocage devenu chronique ?
BELÇİKA HABER - ACTUALITE BELGIQUECoalition Guinness : Bruxelles bat tous les records sauf celui d’avoir un gouvernement « Coalition Guinness » ou nouvel épisode d’un blocage devenu chronique ?
CRISE POLITIQUE BRUXELLOISE
Coalition Guinness : Bruxelles bat tous les records sauf celui d’avoir un gouvernement
« Coalition Guinness » ou nouvel épisode d’un blocage devenu chronique ?
Par Kadir Duran – Bruxelles Korner
Après 541 jours de discussions avortées, d’accords fantômes et de réunions interminables, Bruxelles reste la seule capitale européenne incapable de se doter d’un gouvernement.
Et pourtant, un tournant ou une impasse supplémentaire vient d’être amorcé :
Yvan Verougstraete, président des Engagés, tente désormais une coalition de centre-gauche sans le MR.
Une rupture spectaculaire, un pari risqué… et une réalité arithmétique qui, elle, ne bouge pas.
1. Une coalition « Guinness » pour un record de blocages ?
Yvan Verougstraete a cru bon baptiser son hypothétique majorité "coalition Guinness", référence maladroite au Guinness Book des records :
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record du nombre de jours sans gouvernement,
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record du nombre de partis nécessaires,
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record du déficit à combler,
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record du chaos politique assumé.
Une blague ? Une provocation ? Un coup de communication ?
Quoi qu’il en soit, ses propres communicants ont immédiatement tenté d’éteindre l’incendie en parlant plutôt de « coalition Magritte », pour son caractère surréaliste.
À Bruxelles, même les noms des coalitions deviennent des feuilletons.
2. La stratégie Verougstraete : un pari mathématiquement fragile
Le formateur veut réunir :
Groen – Vooruit – CD&V – PS – Écolo – Défi – Les Engagés
➡️ 43 sièges sur 89 : bloc central solide… mais loin d’une majorité.
Il manque :
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Côté francophone : 1 siège (36/72 requis)
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Côté néerlandophone : 2 sièges (7/17 requis)
Les pistes avancées :
Côté francophone : maquiller une majorité introuvable
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Fabian Maingain (Libres) se dit prêt à apporter sa voix.
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Soulaimane El Mokadem pourrait suivre.
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Des soutiens individuels d’élus MR sont fantasmés en coulisses.
Rien de garanti. Rien de transparent.
Côté néerlandophone : l’illusion Open VLD
Verougstraete tente de convaincre l’Open VLD grâce à une « épure budgétaire ambitieuse ».
Sauf que…
Frédéric De Gucht a déjà dit non. Trois fois. Avec majuscule : NEE.
Le CD&V Bruxelles veut négocier, mais son président Mahdi reste hostile.
La fracture interne est totale.
3. Les partis flamands ne veulent pas d’Ahidar… mais Ahidar devient l’arme secrète
Fouad Ahidar (TFA), longtemps ignoré, ressurgit comme joker involontaire.
Rappel des faits :
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TFA dispose de 3 sièges côté néerlandophone, déterminants.
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Ahidar propose un soutien externe pour installer un gouvernement.
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Aucun parti flamand (Vooruit, Open VLD, CD&V) n’en veut officiellement.
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Défi aussi s’y oppose… tout en travaillant régulièrement avec lui au Parlement.
Mais au bout du tunnel, lorsque toutes les portes se ferment,
la piste Ahidar revient systématiquement sur la table.
➤ Le communiqué cinglant de Fouad Ahidar
Le chef de TFA résume ce que beaucoup pensent :
« On reprend les mêmes et on recommence »
Il rappelle que :
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Verougstraete propose exactement le même scénario qu’après sa mission précédente,
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l’Open VLD avait déjà dit non,
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rien ne prouve que la position libérale a changé.
Et surtout :
« Soit ils ont des indications sérieuses, soit on nous fait perdre du temps. Pour la TFA, c'est inacceptable. »
Ahidar souligne également l’hypocrisie de certains partis qui refusent TFA dans une coalition mais signent des textes avec eux chaque semaine.
Sa ligne est claire :
ouverture au dialogue, mais pas pour servir de variable d’ajustement.
4. Le MR évincé : un choc politique et une contre-attaque imminente
Écarter le MR parti vainqueur des élections à Bruxelles est un geste politique majeur.
C’est aussi :
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une remise en cause directe du tandem MR–Engagés en Wallonie et au fédéral,
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un affront personnel envers Georges-Louis Bouchez,
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un risque calculé par Verougstraete mais qui pourrait se retourner contre lui.
Côté libéral, on estime déjà que :
➡️ la coalition Guinness va échouer,
➡️ Verougstraete finira par revenir vers le MR,
➡️ la riposte sera sévère.
Bouchez avait proposé un gouvernement d’urgence réduit.
Verougstraete lui répond par une alliance… qui n’a pas de majorité.
5. Un gouvernement minoritaire est-il possible ?
Si Verougstraete parvient à installer un exécutif même minoritaire il fonctionnerait :
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comme un gouvernement « 12ᵉ provisoire permanent »
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avec des majorités à géométrie variable
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en négociant chaque texte au cas par cas.
Ce serait instable.
Mais ce serait mieux qu’un statu quo total, estiment certains responsables bruxellois.
La clé :
montrer qu’un gouvernement fonctionne mieux sans Bouchez que contre lui.
C’est la bataille symbolique du moment.
6. Bilan : une tentative audacieuse… mais arithmétiquement quasi impossible
Ce qui joue contre Verougstraete :
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L’Open VLD dit non
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Le CD&V dit peut-être
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Défi hésite
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Le MR explose de colère
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La coalition manque 3 sièges
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Les Engagés risquent une rupture fédérale avec le MR
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Les tensions internes aux partis s’accentuent
Ce qui joue pour lui :
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Un fragment de lassitude générale
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Une volonté diffuse de montrer que Bouchez n’est pas indispensable
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La perspective Ahidar, plan B discret mais réel
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L’appui affiché de Groen, PS et Écolo
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L’image du rénovateur « bruxellois avant tout »
Pour finir : Bruxelles reste bloquée avec ou sans Guinness
La « coalition Guinness » porte bien son nom :
elle bat déjà le record de la solution la plus fragile jamais imaginée.
Verougstraete tente un coup politique inédit, presque désespéré :
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sortir le MR,
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rallier 7 partis,
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convaincre des députés égarés,
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séduire un Open VLD hostile,
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et garder Ahidar caché comme bombe à retardement.
Pendant ce temps, Bruxelles :
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plonge dans le déficit,
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tourne en affaires courantes,
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reste paralysée par des élus plus occupés par la tactique que par les citoyens.
L’échec est probable. Le chaos, certain.
Mais dans cette crise où le surréalisme politique dépasse Magritte,
tout est encore possible.
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